Europe - Noir Désir

Publié le par Benoît Verzat


Salut ! L’autre jour il y a une chanson qui m’est rentrée dans les oreilles, je l’avais déjà écouté, mais sans jamais y faire vraiment attention,  et, sans savoir pourquoi, ce jour la en marchant sur le trottoir de la rue Sucre, entre les odeurs des étalages de fruits, le bruits des taxis, au milieu du mouvement des passants, je suis resté scotché en écoutant ces paroles, acides, amères mais aussi sonnant comme un appel détonnant et provocateur pour une autre Europe.  

Extraits

Les petits patrons font les grandes rivières de diamant.
Deux fois.

Les roses de l'Europe sont le festin de Satan.
Je répète :
les roses de l'Europe sont le festin de Satan.

Nous travaillons actuellement pour l'Europe.
Nous travaillons actuellement pour l'Europe.
Nous travaillons actuellement pour l'Europe.
Nous travaillons actuellement pour l'Europe.
Voire pour le monde.

Chère vieille Europe, cher vieux continent, putain autoritaire,
aristocrate et libertaire, bourgeoise et ouvrière,
pourpre et pomponnée de grands siècles et colosses titubants.

Regarde tes épaules voûtées, pas moyen d'épousseter d'un seul geste,
d'un seul, les vieilles pellicules, les peaux mortes d'hier et tabula rasa...

D'ici on pourrait croire à de la pourriture noble et en suspension.
il flotte encore dans l'air de cette odeur de soufre. Sale vieille Europe,
celle qui entre deux guerres et même encore pendant caressait pour son bien
le ventre des pays de ses lointains ailleurs et la bite à la main
arrosait de son sperme les sexes autochtones.

On se relève de ça ? On se relève de tout, même des chutes sans fond...
Nous avons su monter nous avons su descendre, nous pouvons arrêter
et nous pouvons reprendre...
Europe des lumières ou alors des ténèbres ;
à peine des lucioles dans les théâtres d'ombre.
A peine une étincelle dans la nuit qui s'installe et puis se ressaisit,
et puis l'aube nouvelle, après les crimes d'enfance,
les erreurs de jeunesse on n'arrache plus les ailes des libellules d'or.

Nous travaillons actuellement pour l'Europe.
Voire pour le monde.

Amnistie, amnistie ou alors amnésie, qu'est-ce que vous volez que ça foute,
de toutes façons il faut bien avancer, pressons le pas camarade
et puis réalisons réalisons, il en restera toujours quelque chose, allez !
Matérialiste alors ça fait qu'au moins on est sûr de n'pas se tromper,
et du tangible alors jusqu'à l'indigestion, du rationnel alors
et jusqu'à en crever, des logiques implacables mais toujours pas de sens...
Eh princesse de l'Histoire dans sa marche forcée,
on finit par se perdre en passant sous tes arches multiséculaires.

Voire pour le monde.
Nous travaillons actuellement pour l'Europe.

On est passé de tes arcanes passées, passé de tes arcanes passées,
on est passé de tes arcanes passées, aux charmes technocrates...
Alors l'Europe alors l'Europe alors l'Europe !
Bruxelles, Schengen, Stasbourg, Maastricht, PIB, PIB, CEE, Euratom, OCDE et GATT.
Protégez-nous marché de cet AMI commun d'un monde si petit.
Euromonnaie unique, Nasdaq et CAC 40, orgiaque, idyllique, faites de la poésie,
soutenez la culture, produisez du spectacle et de l'entertainment
comme on dit chez nos frères d'Outre-Atlantique et toc anciens Européens,
nouveaux maîtres du monde pendant que le dragon asiatique rêve…

fait ses étirements….
il est beau et puissant…
crache du feu gentiment.

Pendant qu'Ernest Antoine Seillière fait son apparition et nous déclare sa flamme
il nous aime et nous dit :
" Nous ne sommes pas comme les politiques soumis à la pression de la rue. "


Et on entend au loin résonner les clameurs de la foule,
les beaux mouvements d'ensemble, les défilés glorieux et puis la lutte des classes.
Et maintenant c'est sérieux, eh bébé, c'est sérieux, on ne croit plus en rien,
nous montons de toutes pièces ce buisness et Basta, on chevauche pas Pégase
ça c'était pour l'extase c'est fini.


Extension, expansion si possible, mais pas de rêve à porter seulement des dynamiques.
D'abord la thune, bébé et le reste suivra et le reste viendra c'est ce qu'on dit
je crois en cette époque là bénie des globophages.
Chère vieille Europe, ta tête connaît à peine tes jambes qui souvent
ne comprennent pas tes bras, comment ça marche encore déjà.
Comment ça marche un corps étranger à son corps on n'sait pas on s'en fout
on s'embrasse quand même et puis on a raison.


Sale vieille Europe, te souviens-tu de la force brutale, occident mal luné,
guerre brûlante, guerre froide, et enfin de guerre lasse et enfin de guerre lasse.

Nous travaillons actuellement pour l'Europe.

En veux-tu en voilà des écoles de la performance et voilà des patrons
créateurs du Global buisness dialogue ou Electronic commerce
pour s'asseoir en gloussant sur toutes les exceptions à commencer
par ce truc machin culturel.

Histoires de producteurs et de consommateurs, du producteur au consommateur,
du producteur au consommateur, et des intermédiaires à plus savoir qu'en foutre,
toute ton âme s'est usée sur ce chemin sans fin et sur ce va et vient on y va,

nous aussi, profiter, pas de raison, après tout ça ira,
on n'en aura pour tout le monde, y'en aura pour tout le monde,
on a dit pour tout le monde, pour tout le monde, pour tout l'monde et mon cul !

A quelle hauteur vas-tu ériger tes remparts ?
Où vas-tu repousser tes nouveaux murs d'enceinte ?

Europe  -  Noir Désir,  Des Visages, des Figures (2001)

Publié dans Tarija - Bolivie

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